
À l’heure de la proclamation du nouveau roi Charles III, la France a les yeux tournés vers l’outre-Manche. La monarchie passionne dans l’Hexagone, que ce soit avec la Maison Grimaldi de Monaco ou avec la famille royale britannique, selon les circonstances du moment.
Pour les plus passionnés d’Histoire, notons que la famille royale anglaise descend d’un Français très connu, à savoir Guillaume le Conquérant. D’ailleurs, cette monarchie a pour armoiries le fameux drapeau rouge avec des léopards en or, c’est-à-dire le drapeau de Normandie lui-même. Cela explique également la couleur rouge de la garde royale anglaise.
En outre, l’influence de la France est si importante pour la monarchie britannique qu’encore aujourd’hui, au Parlement, il est crié en vieux français « La Reyne le veult » pour signifier qu’il y a un accord royal au texte. Et ce n’est pas la seule démonstration de la conquête des Normands en 1066.
Cette petite parenthèse historique, et résumée à l’extrême, m’amène à ouvrir un débat qui n’est plus posé depuis longtemps, à savoir : la royauté peut-elle revenir en France ?
Le sondage le plus récent et sérieux que j’ai pu trouver remonte à l’été 2016, et a été réalisé par BVA comme le relate TF1 (source). En dix ans, les chiffres montraient grosso modo que nous étions passés d’1 Français sur 4 en 2007, à 1 Français sur 3 fin 2016, en faveur d’une monarchie. Une hausse significative et non-négligeable.
J’ai essayé de dresser un bilan très personnel des avantages qu’aurait la conservation d’une république en comparaison avec l’émergence d’une nouvelle monarchie.
REPUBLIQUE :

La République a connu des soubresauts et les Français l’ont adoptée et enterrée à plusieurs reprises. Me concernant, ce modèle est avant tout celui de l’égalité de toutes et tous devant la loi, et de la fin des privilèges à outrance de l’Ancien Régime.
Toutefois, nous savons que le président n’est l’élu que d’une partie de la population (27 % des suffrages exprimés pour Emmanuel Macron au premier tour, sachant que des millions de Français ne sont pas inscrits ou ne sont pas allés voter). Ainsi, ce dernier reste pendant tout son mandat le représentant d’une faible partie des Français. Lorsque je vois Emmanuel Macron, je vois un président élu par d’autres que moi. Je ne vois pas la France, mais le choix de certains Français.
MONARCHIE :

Même si jusqu’à présent je n’ai jamais été monarchiste, je reconnais que le débat se pose aussi dans mon esprit. La reine Elisabeth II incarnait le Royaume-Uni au-delà de toutes les confrontations partisanes, tout comme les 12 monarchies en Europe, ou même comme la monarchie marocaine. Un chef de gouvernement est élu démocratiquement pour mener une politique avec les parlementaires, mais il est accompagné d’un monarque qui est l’incarnation de la Nation. De droite, de centre ou de gauche, le monarque est le roi (ou la reine) de tout le peuple et tout le monde sait qu’en cas de situation difficile, quelqu’un veille sur la maison. C’est bien pour cela, d’ailleurs, que les rois des régimes démocratiques ont des audiences régulières avec le Chef de gouvernement. Le roi s’assure que la politique menée est conforme à la Constitution, que tout est en ordre, et peut même conseiller le Premier ministre du moment qu’il respecte la séparation des pouvoirs.
Qui, sérieusement, peut contester qu’avoir l’avis d’un roi – qui a vu plusieurs dirigeants se succéder dans son palais – n’est pas une aide précieuse en cas de doute ou de débuts difficiles ?
Virgile écrivait « Ayez foi dans celui qui fit l’expérience !« .
Lors de la proclamation de Charles III, les commentateurs de BFM TV ont dit une phrase très pertinente : « il a fait sa prépa de roi ». Cela est évidemment un vrai atout. Le prince héritier peut se préparer et se former paisiblement toute sa vie sans craindre de perdre une élection. Il sait à l’avance quelle sera sa tâche et s’y consacre. Je pense évidemment au prince héritier au Maroc qui suit le roi dans tous ses déplacements pour qu’une fois sur le trône, il soit prêt lui aussi depuis son enfance. Mohammed VI avait suivi Hassan II jusqu’à ses 35 ans, et il a observé son prédécesseur faire. Quel président de la République a pu avoir cette formation et cette préparation si riche ?
Je reconnais que de manière plus intime, je verrais ce roi comme l’héritier d’une longue histoire, mais aussi de la France profonde. Car même si beaucoup veulent nous le faire oublier, nous avons un passé glorieux, et pendant longtemps nous étions même le pays de l’excellence artistique. Le pays où Modigliani et Picasso s’affrontaient à travers leurs œuvres d’art. La patrie où l’immense Mozart logea et y rencontra Johann Schubert. Mais aussi la Nation de Rousseau, de Diderot, de Voltaire et de Montesquieu. Sans oublier celui qui n’est pas prophète dans son propre pays, Frédéric Bastiat.
Ne soyons pas anachroniques, et ne mélangeons pas une époque avec un régime. Oui, il serait tout à fait possible et certainement profitable d’avoir une monarchie, très certainement celle de la Maison des Orléans, pour que la France rayonne et qu’elle ait un visage qui l’incarne dans toute sa splendeur, tout en gardant notre régime démocratique. Ne faisons pas du neuf avec du vieux, et définissons une nouvelle Constitution qui détermine qui fait quoi, évitant que le monarque soit simplement figuratif tout en laissant au Chef du gouvernement la place qui doit être la sienne dans un exécutif démocratique. Pourquoi ne pas simplement prendre ce qu’il y a de mieux dans les différentes monarchies actuelles pour en faire un nouveau modèle viable ? Je pense par exemple à ne garder que le visage du monarque et de son héritier, mais sans le côté « people » qu’il peut y avoir autour de certaines familles royales.
Certains diraient à juste titre que le système de caste est contraire aux principes révolutionnaires. Mais quel pays peut se targuer d’être parfaitement égalitaire ? Notre chère République est-elle parfaitement égalitaire ? Je ne le pense pas. Et si c’était le cas, alors pourquoi l’ascenseur social est en panne depuis des décennies ? Pourquoi faut-il en moyenne six générations pour qu’une personne issue de la « couche populaire » puisse atteindre la classe supérieure ? (source)
Au final, et même si ce sujet mériterait encore des centaines de lignes pour avoir tous les éléments sur la table, l’idée générale serait d’avoir un roi des Français intemporel qui incarnerait notre pays et en serait le symbole, accompagné d’un Chef de gouvernement purement politique qui incarnerait la majorité aux élections le temps de son mandat. Ne serait-ce pas un duo gagnant ? Je vous laisse y répondre derrière vos écrans ou en commentaires.